L’histoire du concept et de la mesure de l’insuffisance rénale aigüe (acute renal failure) est liée à l’histoire des sciences.
Les premières descriptions de la production des urines proviennent de l’Egypte antique avec pour organe producteur la vessie. Plus tard dans l’antiquité, les civilisation grec, romaine, mésopatamienne réalisèrent que les reins participaient à la production d’urine.
La première expression linguistique retrouvée dans le monde occidentale de l’insuffisance rénale se retrouve au 17eme siécle sous le terme d’ Ishuria qui signifie à la fois supression et rétention d’urine. Bien que la notion de maladie rénale peut se retrouver dans un texte de premier siècle avant JC (Rufus d’ephesus), la notion même d’insuffisance rénale aiguë ne s’y retrouve pas.
Une première classification apparait au XVIIème siecle (ischuria Vésicalis, ishuria renalis, ishuria urethralis, … selon l’endroit ou s’arrêt la production d’urine). William Heberden ( 1710-1801) qui distinctera le premier la différence entre l’oligurie sur globe vésical versus d’origine rénale décrira également dans son “commentaire sur l’histoire ou le traitement des maladies 1802” l’observation des symptômes de l’insufissance rénale aiguë: “Si le patient ne récupère pas dans la 7 jours de l’anurie il va présenter une profonde altération et la mort”. J Abercombie (1780-1828) sera plus précis dans sa description notant l’apparition progressive d’une confusion, du coma et puis de la mort.. Dans le même temps (XIXeme) une description progressive des anomalies urinaires et de lésions rénales (début de la microscopie glomérulaire par William Bauwmann et Robert Todd) sont réalisées. Mais la taxonomie de l’insuffisance rénale aigüe reste folklorique:
- Ishuria renalis (W . Heberden)
- Hysterical ishuria (Charcot)
- Acute Bright’s disease (Brights)
A la charnière du XIXeme et XX eme Francis Delafield retient toutefois deux éléments important concernant l’insuffisance rénale aiguë appelée à ce moment maladie aigue de Bright : premièrement elle est secondaire à une atteinte du parenchyme rénale, deuxièmement elle est secondaire à une agent toxique pendant la grossesse, un trauma, ou des brulûres. C’est donc dans ce tournant que les rudiments de la pathologie rénale sont lancées sous la forme de discussion de corrélation clinique , anatomo-clinique , histologique et pathophysiologique.
La première guerre mondiale sera la source de nouvelle invention dans la taxonomie néphrologique. A ce moment plusieurs nouveaux termes apparaissent dans les suites de la description d’oligoanurie de soldat: néphrite des tranchées (trench nephritis), néphrite de guerre (war nephritis). Malgré de nombreuse recherche épidémiologique par des médecins des différentes nations et la discussion de l’agent de causalité (infection ? blessure ? nourriture ? gaz de comabt, …) aucune corrélation n’est réalisée de manière patente et les recherches concernant son agent pathogène s’arrête avec la fin de la première guerre mondiale.
- War nephritis 1914- 1948
- Trench Nephritis 1914- 1948
Le tremblement de terre de Messine en 1909 fut un événement dramatique avec de nombreux morts et blessés subissant un « crush syndrome ».Le Dr D’antona, Rizzo et Damascalli sont les premiers à faire le lien entre ce syndrome et les décès suite à un ins rénale aigüe secondaire à la pathologie lors d’un congrès Italien de chirurgie.
Malgré cela entre les deux guerres la recherche sur la compréhension de la microcircualtion rénale, la fonction rénale et la régénération tubulaire s’accentue. Donc , en 1941, lorsque Bywatens et Beals (re)découvre et décrive la maladie chez les victimes de crush syndrome lors des bombardements, les connaissances physiologiques étaient plus avancées. Et ils remettent ainsi sous le feu des projecteurs l’entité insuffisance rénale aigüe même si ils ne la nomment pas telle quelle: “ a case of crush injury with renal failure”. Dans cette effervescence de nombreuses études sur le sujet paraissent avec une liste de noms toujours plus disparates appliquée à l’entité “ insuffisance rénale aigüe” .
Les premiers manuscrits qui emploient le terme de l’insuffisance rénale aigüe (acute renal failure) en terme de taxonomie générale est publiée en 1951 par Oliver JL al. qui fait référence au travail de Dr Homer Smith s . On notera toutefois avant cet article quelques publications plus limitées , mais, employant également le taxon. Mais si le concept émergent de l’insuffisance rénale aigüe est bien nommé en cette année 1951 , indépendemment des mécanismes étiopathogénique, la taxonomie de sa mesure reste floue. Sans corrélation entre les publications suivantes on parlera d’ insuffisance rénale aiguë sévère, anurique, , modérée, post contraste, …;Et cela sans pour autant que la mesure soit identique entre elles pour un même taxon, d’une observation à l’autre.
Il faudra attendre les travaux de la seconde conférence de l’ “acute quality initiative group” pour voir apparaitre une stadification de l’insuffisance rénale aigüe en 2004 (Riffle classification). Ces travaux seront par la suite amélioré et la classificaiton admise en 2011 -2012 sous le terme de classification “AKI ” pour acute kidney injury. Elle est publié par le groupe d’expert internationnaux KDIGO comme référence mondiale.
L’histoire de la classification de l’insuffisance rénale aigüe (ARF) en un terme désignant l’entité nosologique (1951) et un terme statuant sa mesure (AKI) .
Articles inspirés de Emergence of the concept of renal failure , Gerabed E. , History of nephrology, Vol 4 225-230. ; de podcast science : histoire du système métrique.
Remerciement à l’International Association for the history of nephrology.